Mahomet caricaturé

Dans le monde tel qu'il est, fragile, incertain et explosif, nous n'avons pas besoin de provocations inutiles. Ne les ayant pas tous vu, je m'autorise néanmoins à penser que les dessins caricaturant le prophête Mahomet dans un journal conservateur en était une. Dans son billet Koz semble indiquer qu'il entendait "tester la liberté d'expression au Danemark". Quelle idée!

Pour autant, et même si ce n'est pas une raison, quand Mahomet aura été autant caricaturé, villipendé ou brocardé que le Dieu des chrétiens et toutes les références de cette religion, les Musulmans qui manifestent aujourd'hui pourront rejoindre ceux qui s'offusquent des effets délétères des provocations caricaturales et gratuites proférées à l'encontre des valeurs confessionnelles et agissent en conséquence au niveau du droit. Comme l'a rappelé Nicolas Sarkozy, "Lorsque la caricature va au-delà du raisonnable, ce sont les tribunaux qui en jugent, et pas les autorités religieuses, et pas les gouvernements de pays musulmans".

De même, il y a indéniablement derrière cette affaire une manipulation à laquelle les Etats-Unis ne sont pas étrangers comme l'a très bien analysée Dominique Strauss-Kahn, dimanche dernier sur RTL. La position de l'administration Bush est assez claire. Tout ce qui peut affaiblir le crédit de l'Union Européenne au Proche-Orient en particulier, et dans le monde musulman en général est bon à prendre pour, à contrario redorer le blason américain.

Enfin, le pire dans toute provocation inutile, c'est qu'on trouve toujours quelqu'un pour en rajouter. Drâpé dans une bonne conscience et un sérieux dramatisant l'illusion d'un retour à la censure, Charlie Hebdo en a rajouté une couche en publiant ce matin l'ensemble des dessins qui ont mis le feu au poudre. Se référer à la bêtise et à la méchanceté n'excuse pas tout. On prend toujours le risque de trouver, non seulement plus bête et méchant que soi, mais aussi plus manipulateur et machiavélique. Avec la complicité de Charlie Hebdo, les intégristes ont rendu notre monde un peu plus fragile, incertain et explosif.