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l'éternité plus un jour
8 mars 2008

Mauvaise foi toute britannique

Sur son blog, Charles Bremner s'offusque du bénéfice politique que Nicolas Sarkozy s'octroie en tirant à lui la couverture du mirifique contrat signé par EADS avec l'armée américaine. Le Président a argué de cette réussite commerciale inédite pour faire reconnaître à l'opinion française la pertinence de la rupture qu'il veut incarner. En l'espèce, il entendait vanter l'intérêt de son rapprochement ostentatoire avec le Président des Etats-Unis, déclarant au Figaro: "Quand nous nous réconcilions avec les Américains, n'est-ce pas un changement bienvenu et peut-on penser une minute que le contrat qu'a gagné magnifiquement EADS pour les avions ravitailleurs aurait été signé dans le climat de tension qu'on a connu entre les Américains et les Français ?"

La naïveté ne pouvant pas passer pour un trait de caractère de l'excellent correspondant du Times à Paris, il s'agit sans doute du soucis insatiable et perfide des britanniques de chipoter la moindre réussite française quant bien même, celle-ci se partage avec d'autres.

Naturellement, EADS est un groupe international qui n'emprunte pas uniquement au génie français. Il doit beaucoup au talent allemand et, dans le cadre d'un véritable projet communautaire, pourrait certainement profiter davantage de l'excellence britannique. De même, on ne saurait nier tout le travail en amont engagé, des mois durant, par les équipes d'EADS pour convaincre leur client américain de la supériorité de leurs avions par rapport à ceux de Boeing. De cela, Nicolas Sarkozy en est certainement convaincu et c'est finalement un pur hasard qu'il se soit trouvé à être Président de la République au moment ou EADS redresse la tête de belle manière après une période de turbulences. Charles Bremner aurait pu rappeler l'enjeu qu'avait représenté cette entreprise, l'année dernière, au cours de la campagne présidentiel. Tous les candidats avaient contraints de faire le pèlerinage à Toulouse, au chevet de salariés inquiets pour leur sort. De même, il aurait pu mentionner l'initiative du tout nouveau Président de la République qui, à peine élu, avait embarqué la Chancelière allemande pour envisager les solutions susceptibles d'assurer la pérennité d'un fleuron industriel et commercial européen. Au contraire, l'excellent correspondant du Times préfére insister sur le nationalisme étroit du dirigeant français en l'opposant au choix courageux de l'armée américaine, contraire aux intérêts économiques des Etats-Unis. Il n'a pas tort en écrivant que le Président français n'aurait jamais autorisé l'armée de son pays à aller se fournir auprès d'une entreprise américaine. Il est plus contestable lorsqu'il dénonce Nicolas Sarkozy pour son interventionnisme prétendument outrancier. Comme si le président français était le seul à refuser le jeu du marché mondial et à se défaire de toute intervention en matière économique.

Fort heureusement, à défaut de traiter son sujet dans une perspective objective, Charles Bremner n'est pas complètement malhonnête. Ainsi, il explique qu'en pleine campagne électorale américaine, les candidats démocrates s'alarment de la décision de l'US Air Force. Quant au représentant pressenti des républicains, il fait profil bas pour être considéré comme l'un de ceux qui aurait écarté l'avionneur américain dans le cadre d'une enquête parlementaire ayant révélé un pacte de corruption entre Boeing et le ministère de la Défense. Le Congrès qui doit autoriser les conditions financières - sur fonds publics - du contrat avec EADS, n'est pas en reste: "Vu les ramifications de cette décision pour les Etats-Unis, l'armée de l'Air doit expliquer au Congrès comment elle correspond aux besoins à long terme de notre défense et des Américains", assure sa Présidente, Nancy Pelosi. "A-t-on prêté suffisamment d'attention à l'impact de ce contrat sur les emplois en Amérique et sur notre sphère technologique?", demande encore la plus haute responsable du Congrès. Comme quoi l'approche patriotique de l'économie n'est pas forcément l'apanage critiquable du président de la République française.

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