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l'éternité plus un jour
31 juillet 2012

Journal de France

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C'est l'histoire d'un français moyen, bonnet vissé sur la tête qui parcourt l'hexagone à bord d'une fourgonnette. Il scrute la province profonde à la recherche de ses clichés. Le regard est aux aguets pour saisir la lumière autant que la mémoire d'un vieux pays sur un vieux continent. Entre deux étapes au petit bonheur la chance sur des lieux de mémoire qui engloutissent peu à peu la vie, le film intercale des rushs rappelant quelques soubresauts du monde de ces 40 dernières années. Le plan fixe laisse la place au mouvement. Car sous son bonnet et derrière sa chambre d'un autre temps. Raymond Depardon est un voyeur impénitent du monde. Sa vie durant, il est allé exposer son regard au plus près des turbulences ou la violence est une extrémité quotidienne qui consume les êtres. Entre cette France à l'abandon et cette rébellion intemporelle vécue aux quatre coins de la planète, le contraste est saisissant. Le village est global et l'homme peu de choses.

Le cinéma de Raymond Depardon, comme sa photo, passe par la présence, être là, sur l'instant et dans le vif du sujet. Il est au contact et sa caméra touche ce qu'elle filme, suit ses sujets jusqu'à l'insistance qui permet de pénétrer dans l'âme de celles et ceux qui bon gré mal gré s'exposent devant lui ; scènes de foule déambulant dans la rue, défilé patriotique en République centreafricaine, pas de danse esquissé par Bokassa, femmes voilées dans un souk du Moyen-Orient, mercenaires au Biafra, regards profonds de rebelles Erythréens ou la minute de silence majestueuse de Nelson Mandela et l’interview dramatique de Françoise Claustre. À chaque fois, les images n'ont de force et de sens que parce qu'un regard était là pour les saisir. En contrepoint de ce tour du monde des points chauds, il y a aussi ces retours intermittents sur la France au travers des documentaires que le rapport de ses concitoyens aux institutions a  inspiré à Raymond Depardon, la police, la justice, la politique ou les hôpitaux psychiatriques. Et à chaque fois le spectateur profite de cette curiosité d'un regard qui fait d'instants de banalités des moments de simple émotion exceptionnels, tels ce flics racontant benoîtement à des collègues qu'il a fait un pendu ce matin ou ce face à face mutique entre un prévenu accusé de vol et son jeune avocat commis d'office. Même du sordide. Raymond Depardon fait sortir l'éclat.

Enfin, avec cette succession de scènes surannées à la pellicule jaunie qui passent en revue une œuvre et retrace le parcours d'une vie perpétuellement en éveil, ces chutes de bobine donnent un bel exemple de modernité. À l'heure de You tube et Dailymotion où tout événement est séquencé en quelque minutes pour mieux capter l'attention et le regard, Raymond Depardon et Claudine Nougaret nous transportent dans un patchwork d'univers qui racontent beaucoup de notre humanité contemporaine et fonde un peu plus la perplexité qu'inspire la condition humaine.

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