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l'éternité plus un jour
7 août 2014

Réduction dégressive des cotisations salariales : derrière la censure du Conseil constitutionnel

Force revient toujours à la loi fondamentale. Et le Président du Constitutionnel n’est pas peu fier de rabaisser un peu plus le pouvoir législatif dans ses pantomimes incantatoires aux marges de manœuvres minimales pour faire bouger notre modèle social entre rigueur et relance.

Tel est donc la décision du Conseil Constitutionnel de déclarer contraire à la Constitution pour « rupture d’égalité » l’allégement de cotisations salariales pour les petits revenus ce que se faisant il autorise pour les cotisations patronales depuis belle lurette. Les voix du droit sont souvent impénétrables. Le bilan est calamiteux pour la crédibilité des hommes politiques et la confiance qu’on leur accorde. Quand leur bras armé du pouvoir, c’est-à-dire la loi, est si vacillante, si incertaine et si fragile, c’est l’ensemble de notre édifice démocratique et Républicain qui s’en trouve affaibli. Car il faut se reporter aux débats de la séance publique de l’Assemblée nationale au cours de laquelle l’article 1er du PLFSSR fut discutée – sans vote ! - pour comprendre le nœud gordien du pouvoir. La mesure d’allégement de cotisations sociales salariales faisait l’unanimité des groupes politiques. Toute en expertise et jamais sans demi-mesure, Karine Berger déclarait : « Nous vivons un moment particulier – pas seulement sur le plan institutionnel – car avec la baisse des cotisations salariales, nous inventons le moyen de soutenir le pouvoir d’achat des Français en utilisant non pas l’arme de la fiscalité, mais le levier des cotisations salariales. Cela n’avait jamais été fait ». Et pour cause ; l’opposition, les nombreuses déclarations de ses représentants lors de cette séance de nuit en font foi, était également pleinement favorable au nom de ce sacro-saint pouvoir d’achat. Sur 187 votants, 182 ont voté pour. Le risque d’inconstitutionnalité n’est pas mentionné. La politique, ce n’est pas que du droit. Que le groupe UMP défère la loi devant le Conseil Constitutionnel et  la « progressivité des prélèvements salariaux » qui, quelques semaines plus tôt ravissait la représentation nationale, est bannie.

Facile aujourd’hui de tirer à boulet rouge sur le Président de la République à qui tout échappe et rien ne réussit. Le Gouvernement de Manuel Valls qui se voulait responsable et social, est fragilisé alors qu’il sait bien ce qui l’attend à la rentrée.

Mais le caractère désolant de cette inconstitutionnalité qui tourne au drame politique n’est peut-être pas l’essentiel de cette affaire. Bien sûr, il met à mal le périlleux équilibre du pacte de responsabilité, idée magnifique pour une storytelling que le Président de la République avait décidé de nous raconter le 31 décembre dernier en guise de bons vœux. La nouvelle année avait son fil rouge, son histoire avec la liste des acteurs, une partition pour chacun et des annonces qui fleuraient bon les rebondissements afin de faire tenir le tout en plusieurs épisode et d’étirer le temps de l’action par la force du verbe et les postures qui se tiennent de conférences sociales en séminaires gouvernementaux. Le Conseil Constitutionnel, de moins en moins réticent à jouer les premiers rôles, s’est invité dans le scenario. A moins qu’il ait été savamment programmé pour dire ce qu’il a dit. Car au-delà du droit et accessoirement qu’une cotisation sociale, contrairement à la défiscalisation des heures supplémentaires, n’est pas faite pour donner du pouvoir d’achat, mais des prestations sociales, sa censure vient anéantir une mesure qui n’était pas financée. C’est là le pire de l’histoire.

La mesure du Gouvernement qui pesait sur le budget de la sécurité sociale déjà déficitaire n’était qu’une annonce – certains ont parlé de leurre – dont la réalité aurait été formalisée dans le cadre du budget 2015. On touche là au vide sidéral d’un pouvoir qui n’a prise sur rien et rapièce une solidarité nationale exsangue. « Le Gouvernement proposera dans le cadre des lois de financières pour 2015 qui seront examinées à l‘automne des mesures alternatives de même ampleur » ont assuré les ministres des finances, de la santé et du budget dans un communiqué conjoint. C’est bien le moins. Mais ça reste une illusion du verbe car censure ou pas du Conseil constitutionnel, au moment faire voter sa disposition d’un coût de 2,5 milliards d’euros, le Gouvernement n’avait pas le premier euro pour la financer.

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Commentaires
B
Que l'UMP ait voté pour avant de saisir le Conseil constitutionnel, ça en dit long sur la rectitude programmatique de l'opposition et ça relativise fortement ses critiques que l'on entend sur l'amateurisme du Gouvernement.
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