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l'éternité plus un jour
2 décembre 2020

Valéry Giscard d’Estaing 1926 - 2020

Ce qui restera d’abord de Valéry Giscard d'Estaing, c’est une grande frustration et une profonde injustice. Quel aurait été le destin de la France sans ce funeste « 10 mai 1981 » qui coupa l’élan libéral et réformateur impulsé sept ans plus tôt?
À 55 ans, au faîte d’un parcours sans faute, il avait tout donné et quittait le pouvoir. Il parlait d’un au-revoir. Ce serait un adieu qui demeure irrésolu. L’engagement politique, aussi talentueux soit-il, se heurte aux vicissitudes des rivalités picrocholines sans égard pour la grandeur nationale. Que le coup de grâce lui fut donné par son allié d’hier, nourri de la même ambition au point de devenir l’un de ses successeurs n’est pas le moins désolant. Si la rancune a été jetée à la rivière, elle flotte encore comme la présence rémanente d’une promesse contrariée. « Les hommes font l’histoire, mais ils ne savent pas l’histoire qu’ils font ».
VGE a voulu remonter la pente. Il n’est jamais vraiment revenu. Reste un coup politique fabuleux qui fait aimer la politique pour ce qu’elle est : un art appliqué à tordre les circonstances pour inverser le cours des choses, et un septennat charnière, plus utile qu’on ne le dit.
Le coup politique, c’est le culot d’un homme presque seul assorti d’une intelligence hors norme qui en fit un tacticien hors pair et un visionnaire sans égal pour gagner l'Elysée. Rétrospectivement et à jamais, l’effet de souffle est saisissant. Dans un portrait plein d’admiration, Alain Duhamel se souvient d’une campagne qui fut la plus brève et la plus spontanée de la Vème République. Il y flottait un parfum d’inconvenance et d’innovation. VGE y marqua à jamais la manière d’être en politique: « je veux regarder la France au fond des yeux, lui dire mon message et écouter le sien ». Là est le modèle, là est la référence!
Le septennat charnière, c’est l’importance de réformes conçues pour une « société libérale avancée » dans un pays désormais condamné à vivre et à penser son avenir à l’aune de la globalisation (d’où l’ardeur européenne qui ne l’aura jamais lâchée). La Présidence de la République y fut placée à hauteur d’homme - s’est-on jamais demandé si de Gaulle aimait les gens? Elle était incarnée en proximité avec la société. Le bilan du septennat Giscardien confirme l’esprit de réforme face à une conjoncture compliquée et malgré une majorité politique déficiente. VGE fut l’artisan d’une modernisation indubitable de la France. Peu d’hommes d’Etat auront été aussi attentifs à l’avenir et à ses enjeux. Il attendit en vain d’en être crédité.
De cette dynamique contrariée en 1981 date l’attente confuse d’une reconquête. Elle sera vaine. Las, VGE n’aura pas pu rassembler « deux français sur trois ». Il y aura bien la remontée humble et modeste à partir d’une élection cantonale en 1982, le retour à l’Assemblée nationale, la région Auvergne et Vulcania, la Constitution Européenne - exercice intellectuel passionnant mais politiquement désastreux dès lors qu’elle était laissée dans les mains de Jacques Chirac -, l’Académie française aussi. Mais cette présence constante, marquée d’une superbe autorité intellectuelle dans le débat public qui offraient des enseignements utiles à la compréhension du monde, ne pouvaient rien contre le temps qui passe. Faute de deuxième chance, VGE demeure l’éternelle jeunesse d’une France qui n’aurait pas fait « le bon choix ». On vit aussi de rêves perdus. « C’était pas si mal sous Giscard ».

 

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