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l'éternité plus un jour
17 février 2006

Analyste d'Edouard Tétreau, Grasset, 278 pages, 19€

tetreau_cJe l'ai lu pour vous. J'espère que vous en aurez profité pour vous délecter du dernier Jonathan Coe, relire Madame Bovary ou avaler d'une traite le dernier Hervé Bentegeat comme on déguste le dernier Philippe Sollers. Analyste nous plonge dans le monde impitoyable de la finance à l'époque de la bulle spéculative des 90's. D'un style assez léger et avec un récit plutôt ludique, Edouard Tétreau veur profiter de son expérience pour dénoncer les travers d'une financiarisation de l'économie qui agissent au détriment de l'économie réelle.

Edouard Tétreau est le prototype des français bien nés, issus d'une belle et grande école de commerce. Fort de ce pedigree que beaucoup lui envient, il intégre une banque d'affaire en qualité d'analyste. A leur propos, l'auteur parle de "mandarins de la finance". C'est dire le statut qui leur est conféré. Leur talent consiste à ingurgiter en un minimum de temps, un maximum d'information sur les entreprises, leurs comptes, bilans et résultats. Leur travail servira d'argumentaires aux "sales" (prononcer "selz"). Edouard Tétreau parle "des seigneurs de la bourse", qui pendus au téléphone dans les salles de marché, doivent inciter les investisseurs à vendre ou à acheter. Que ceux qui seraient tentés pas une explication plus circonstanciée en matière de technique financière, aillent donc lire ce qu'en pense Pierre Bilger.

Edouard Tétreau tente de briser les masques de l'usurpation et du cynisme en même temps qu'il en profite poui règler un compte avec Jean-Marie Messier. Passons sur le réglement de compte un peu private joke pour voir les masques tomber. En fait les analystes sont des agitateurs, non pas d'idées mais de valeurs. Par ce qu'ils disent, vrai ou faux peu importe, ils doivent inciter les investisseurs au mouvement. Ces derniers ne sauraient rester inertes sur leurs positions. Ils doivent vendre, acheter, vendre, acheter,etc...au rythme du zappeur. En entendant création de valeur, on pense benoîtement au travail des salariés, à la production de biens et de services, de quoi satisfaire un marché et générer de la croissance dans une économie soucieuse d'améliorer son PIB. Pas du tout, la création de valeur c'est un concept flou qui relève plus d'un alignement de chiffres à l'interprétation douteuse que le résultat d'un processus économique évolutif, progressif et rationnel. Rappelons que nous sommes à l'ère de la bulle spéculative. La création de la valeur telle qu'elle est perçue par l'économie financière incite aux comportements grégaires autour de la volatilité des titres qu'impose l'obligation imbécile qu'ont les entreprises côtées de publier des résultats tous les trimestres. Cette débauche d'information comptable finit par ne plus rien signifier sauf ce que les analystes veulent bien en dire. Ainsi, ils alimentent à satiété des investisseurs plein aux as qui achètent, vendent, achètent, vendent, achètent.... Dois-je préciser que les montants en mouvement n'ont rien à voir avec ceux figurant dans un PEA de bon père de famille? Cette folie financière accule par la même les entreprises à maquiller leurs comptes de résultats, avec les conséquences tragiques de faillites retentissantes.

Vous l'aurez compris, Edouard Tétreau, après avoir agité le système plus souvent qu'à son tour, crache dans la soupe. Autant que cela soit possible, il le fait assez élégamment. Reste à savoir si son témoignage qui a reçu le prix des lecteurs du livre d'économie 2005 délivré par le Sénat, sera suivi d"effets afin de revenir à une réalité plus saine.

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