François Bayrou est un leurre
La semaine dernière fut faste pour François Bayrou. Certains sondages le créditent d'un score jamais atteint jusque là...12, 13, 14, 15%...! Alors forcément une telle visualité fait rêver le nouveau champion du ni-ni, ni droite, ni gauche, les deux bien au contraire.
Deux remarques pour relativiser cette embellie qui ressemble trop bien à celle vécue par Jean-Pierre Chevénement il y a cinq ans. On sait ce qu'il advint du troisième homme et de la famille politique dont il était issu.
La montée en force "sondagière" de François Bayrou fait avant tout le jeu des médias. Il leur permet d'inoculer un peu de suspens afin de soutenir l'attention d'un lectorat ou d'un auditoire qu'il leur faut perpétuellement conquérir. François Bayrou ne le croit certainement mais il y a bien collusion d'intérêt entre lui et les grandes chaînes de télévision, les stations de radio périphérique et les grands titres de la presse qui s'épient et se copient. Ainsi, le dernier numéro du Journal du Dimanche aura, avec la une et une pleine page, complaisamment relayé le nouveau statut du candidat se réclamant du centre. De même l'invitation de Jean-Michel Apathie au micro de RTL fut tout à fait opportune. De quoi lui permettre de déclarer sans modestie: "Le regard sur moi a changé".
Oui mais voilà, le centre, c'est quoi, le centre c'est où? Lorsque une large partie des membres du groupe UDF à l'Assemblée nationale vote contre les recettes du budget en 2005 et contre le budget en 2006, ou encore une motion de censure déposée par le PS contre le gouvernement Villepin en mai 2006, ce n'est plus le centre. C'est l'opposition.
C'est la seconde remarque qui relativise la sincérité et la légitimité du candidat Bayrou. Elle est parfaitement illustrée par l'examen, cette semaine à l'Assemblée nationale, d'un Projet de loi relatif à l'audiovisuelle et à la télévision. François Bayrou est monté en première ligne pour dire tout le mal qu'il pensait de ce texte. Il ne s'agit pas ici de commenter son appréciation du projet et ses idées sur le fonds. Il s'agit seulement de constater sa posture politique. C'était celle d'un opposant virulant, au même titre que les orateurs des groupes communistes et socialistes. Et comme les socialistes et les communistes, les députés de l'UDF ont voté contre le projet de loi. De fait, François Bayrou s'inscrit dans un jeu politique dont le principe majoritaire au non de l'efficacité démocratique fait des tenants d'une troisième des illusionnistes à la peau douce.
Voilà pourquoi son positionnement dans la campagne présidentielle n'est pas tenable. Il relève d'un folklore qui renvoie davantage aux affres d'une IVème République sclérosante qu'à une démocratie moderne soucieuse d'efficacité dans l'action publique et de clarté de la part de ses animateurs dans leurs prises de décision. Pour l'instant, le candidat de l'UDF fait le spectacle et traite par le mépris la permanence culturelle d'un clivage droite-gauche. Or comme l'a dit Nicolas Sarkozy à son intention : "Les Français choisiront. Mais lui aussi devra choisir." Y compris si, par hasard, il figurait au deuxième tour.