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l'éternité plus un jour
11 mars 2007

Allocution télévisée de Jacques Chirac

Ne lui restant plus que l'art de la communication, Jacques Chirac a, une dernière fois envoyé ses fariboles à la tête de ses compatriotes. Il n'y avait pas grand chose à attendre de cette allocution solennelle, l'Elysée ayant éventé depuis belle lurette son retrait de la vie politique. Restait juste à enjoliver les choses.

Sans effet de surprise, l'intervention télévisée mérite un commentaire magnanime. L'essentiel est qu'après quarante années d'engagement politique Jacques Chirac tourne la page et fasse place nette pour une génération nouvelle au service d'une France nouvelle dans un monde nouveau.

Deux remarques sont toutefois à relever sur sa prestation. La première a trait à la personne du Président de la République. La seconde porte sur son influence dans la campagne présidentielle.

D'abord, c'est peu de dire que le Président de la République ne s'est pas épanché sur son bilan comportant plus de lacunes que d'actes de gloire. Jacques Chirac a toujours évité de s'appesantir sur son passé. Cette attitude a eu deux avantages. Elle lui a permis de se forger l'image d'un homme toujours ardent, fonceur et porté sur l'avenir. En même temps, elle lui a épargné les noeuds au cerveau qu'auraient dues générées toutes ses bévues. Cette mémoire sélective est un atout incommensurable pour durer, au physique comme au mental. De fait, les bilans n'intéressent pas Jacques Chirac. D'autres se chargeront de la besogne hagiographique et c'est sans rire qu'il a annoncé à ses compatriotes "qu'au terme [de son mandat], "le moment sera venu pour moi de vous servir autrement."

Privilégiant donc une vision prospective plutôt qu'un récit descriptif, Jacques Chirac a ensuite délivré plusieurs messages. Le Président excelle dans les idées générales, notamment celles qui exhalent la compassion et l'empathie. Rien à dire sur le fond : refuser toute compromission avec l'extrémisme, croire en la France et en son modèle social, faire l'Europe, promouvoir l'exigence écologique et défendre la paix dans le monde. On adhère tellement qu'on pourrait croire au programme d'un candidat en campagne. En revanche, l'ordre établi par le Président de la République pour délivrer ses recommandations, pose question. Le fait de commencer par les dangers de l'extrémisme n'étaient pas neutre vis à vis de Nicolas Sarkozy qui  risque de s'abîmer à force de surenchérir sur l'idée nationale. Un ordonnancement dénué d'arrière-pensées de son propos aurait dû faire prévaloir, la croyance en la France - "vous devez toujours croire en vous et en la France" -, la revendication de son exception - "la France n'est pas un pays comme les autres", et l'Europe - "C'est notre avenir qui est en jeu".

De cette hiérarchie des injonctions présidentielles ressortait le sentiment profond de Jacques Chirac qui répugne à devoir imaginer le fait que Nicolas Sarkozy puisse lui succéder. Contrairement à ce qu'il prétend, le second n'a rien à attendre du premier. Le Président de la République veut ancrer son Ministre de l'Intérieur dans son bilan, alors que le candidat de l'UMP entend incarner la rupture. Le soutien de Jacques Chirac, chichement mesuré et qui ne déplacera pas une voix en faveur de Nicolas Sarkozy, relèvera plus de la défiance que de l'adoubement. François Bayrou saura certainement en tirer parti. Comme l'a déclaré un conseiller du président: "Chirac est beaucoup plus un problème pour Sarkozy que Sarkozy n'est un problème pour Chirac!". Au delà de la relation compliquée entre les deux hommes, on retrouve une constante de la situation qu'avait inaugurée François Mitterrand et Lionel Jospin en 1995. Le passage de témoin n'avait alors rien eu de spontané, de généreux ni d'enthousiasmant.

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