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l'éternité plus un jour
23 juin 2006

Quand la réforme ne passse pas

De manière implacable comme à son habitude, le Conseil Constitutionnel vient de tuer dans l'oeuf les velléités réformatrices du Président de l'Assemblée nationale. Vous pourrez lire ici et les analyses juridiques qui fondent la pertinence de cette décision et, par voie de conséquence, les défauts de la réforme proposée.

Deux remarques à caractère politique peuvent être néanmoins ajoutées à ces commentaires.

Sur le fond, les intentions de Jean-Louis Debré sont valables et partagées par beaucoup. Contre une dévalorisation constante et durable du rôle du Parlement, il a proposé plusieurs mesures afin d'endiguer le phénomène et améliorer la qualité du travail des représentants de la Nation Il entendait notamment instaurer "un statut" de l'opposition au sein de l'Assemblée nationale. La volonté de clarifier les positionnements politiques entre les députés qui soutiennent le Gouvernement et ceux qui contestent son action n'est pas complétement infondée. Même si elle peut paraître maladroitement formulée, elle exprime le besoin qu'a notre démocratie de se prémunir contre les aventures marginales qui émiettent notre paysage politique sans fonder de réelles alternatives en mesures d'assumer le pouvoir. De ce point de vue la concommittance entre les débats sur cette question à l'Assemblée nationale et les hésitations du Conseil Supérieur de l'Audiovisuel concernant la comptabilisation des temps de parole de l'UDF, est révélatrice d'une prise de conscience des dangers de ce délitement révêlés lors de la dernière élection présidentielle.

Néanmoins, on peut se demander si le Président de l'Assemblée nationale n'a pas condamné lui-même son ambition à l'échec par plusieurs défauts de méthode alors qu'on sait bien qu'en politique, elle constitue l'élément essentiel du succès.

Il en est tout d'abord ainsi du calendrier retenu. L'adoption de ce genre de réforme qui concerne les règles d'un travail collectif entre tous les députés doit faire prévaloir un consensus. Or on arrive en fin de législature. Les positionnements se radicalisent. Tous les regards et les efforts sont tournés vers l'affrontement qui s'intensifie dans la perspective de l'élection présidentielle. De fait, le compromis entre les groupes politiques de l'Assemblée nationale n'a pas eu lieu. L'opposition s'est déchaînée faisant valoir les risques d'inconstitutionalité des textes proposés. La décision du Conseil constitutionnel lui a donné raison.

Or justement, la sanction du Conseil constitutionnel révèle une autre défaillance du Président de l'Assemblée nationale. Le fils du père spirituel de la Vème République se pique de défendre l'héritage familial qu'il aime à confondre avec celui de la démocratie française. Alors que de plus en plus de voies s'élèvent pour l'avénement d'une VIème République, Jean-Louis Debré défend avec la dernière énergie la Constitution de 1958. Comment se fait-il alors qu'il n'ait pas mesurer les risques d'inconstitutionnalité de ses propositions? Pire, pourquoi n'a-t-il pas pris préalablement l'avis du Président du Conseil consitutionnel qui nonobstant le devoir de neutralité attaché à sa charge, n'en reste pas moins en capacité d'adresser des messages amicaux et des conseils préventifs au nom d'une proximité partagée autour du Président de la République?

On peut effectivement penser que Jean-Louis Debré avait les moyens de s'éviter un échec dont le retentissement bien que confidentiel n'est pas insignifiant. Tout d'abord, il sappe un peu plus le crédit de la majorité sur sa capacité à mener à bien des réformes. Ensuite, et c'est l'aspect cocasse de cette affaire, il offre un argument de plus à ceux qui souhaitent passer à la VIème République. Invoquer la Constitution qui empêche de réformer le réglement de l'Assemblée nationale, c'est une raison supplémentaire offerte à celles et ceux qui pensent qu'il est utile d'écrire une nouvelle régle fondamentale.

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