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l'éternité plus un jour
19 mai 2011

L'affaire DSK ou l'histoire comme elle s'écrit

Après le choc des photos, le poids des mots. On a assez dit que le patron du FMI, soumis à la démission pour préserver l'institution comme en 1999, il avait préservé le Ministère français de  l'économie et des finances, disposait d'un quarteron de communicants parmi les plus pointus du moment. Ils vont pouvoir justifier pleinement leur réputation dès lors qu'à partir de faits supposés, il convient aux deux parties en présence de construire la vérité la plus probante possible. La défense se cherche encore une ligne. Après avoir plaidé l'innocence pleine et entière, "Il plaidera non coupable", les avocats de Dominique Strauss-Kahn et ses spin-doctors évoquent un consentement de la plaignante. Rien n'est figé. Tout bouge pour que les choses s'emmêlent, se décalent et se contredisent tandis que l'opinion s'en trouve déboussolée et abandonne des certitudes trop vite établies sur la culpabilité de l'un et la vulnérabilité de l'autre. Le complot peut faire partie de l'attirail - "C'est le FMI qu'on a voulu décapiter", la maladie aussi - "Le pouvir et le sexe, c'est la même libido. Ce sont deux formes de pulsion quasi irrésistibles. Ceux qui en sont possédés perdent la tête".

On voit déjà que sur la restitution des faits et leur chronologie, les choses sont mouvantes. C'est d'opportunité pure, et encore plus  d'imagination qu'il va s'agir pour contredire les versions rapportées au fil du temps et semer l'expectative autour d'un emploi du temps millimétré entre 12H00, heure supposée à laquelle une femme de chambre du Sofitel de New-York pénètre innocemment dans la suite 2806 et 16H40, lorsque Dominique Strauss-Kahn est appréhendé calmement dans l'avion prêt à décoller du vol Air France 23. Les policiers s'interrogent notamment sur le délai d'une heure entre son départ de l'hôtel et le moment où l'alerte a été donnée. Le moindre grain de sable dans cette séquence haletante et c'est la vérité qui bascule d'un côté ou d'un autre. Le feuilleton ne fait que commencer. Il promet.

Il est un travail plus insidieux mais non moins fortuit ni inutile qui s'effectue en marge. Quelque chose de plus subtile que le soutien outragé de ses amis politiques: "Y'a pas mort d'homme !" ou "Toute cette histoire ne lui ressemble pas". Soudainement, le débat a dérivé sur la responsabilité des journalistes et du milieu politique qui connaissaient les travers affirmés du prévenu. De vieilles histoires que l'élite médiatico-politique faisait circuler sous le manteau sont déballées au grand jour. Prophète d'un jour, le journaliste Jean Quatremer invective ses confrères d'un: "Je vous l'avais bien dit" salvateur. La presse anglo-saxone s'en prend à coeur joie à sa consoeur française. Elle lui reproche d'avoir "fermé les yeux". Aussitôt ce petit monde, confiné dans son entre-soi, déjà porté à subir l'impopularité de ceux qui se lèvent tôt ou touchent le RSA, s'épanche à tout va pour un examen de conscience culpabilisant qui confine à l'introspection déontologique. La frontière entre le In et le Off est de nouveau battue en brèche et c'est alors une remise en cause collective d'un système ou la liberté d'informer vire au laxisme ou à la connivence. Ainsi, le débat se déplace incidemment. Il passe d'un crime misérable supposément perpétré par un individu, fut-il Directeur du FMI et présidentiable en puissance, à la mise en cause d'une omerta partagée par laquelle tout un chacun se sent un peu comptable de cette situation. De fait, par défaut de vigilance, nous avons tous à porter une part du fardeau de la culpabilité supposée de Dominique Strauss-Kahn. Tout un chacun l'accompagne, et notamment les plus puissants, parce qu'ils savaient que derrière un séducteur un peu trop pressant devait se cacher un pervers sexuel et violent. C'est aussi avec ce regard compatissant, qu'on a vu, au cours de cette audience choc d'un tribunal de New-York, le plan fixe d'un homme piteux qui au-delà de sa simple personne représentait, il y a peu encore, un idéal présidentiel pour des millions d'électeurs. Dominique Strauss-Kahn n'est pas seul.

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